Mon médecin s’appelle smartphone
Ça fait longtemps que la réalité dépasse la fiction. Soit. Il suffit de regarder autour de soi, dans la rue, au restaurant, au spectacle, pour savoir que le téléphone portable est devenu une nouvelle addiction chez certains. Re-soit ! Mais la nouvelle qui vient de tomber des Pays-Bas a quand même de quoi surprendre. Une ville de là-bas, Bodegraven, teste actuellement un nouveau dispositif à un carrefour situé près de plusieurs écoles.
Une signalisation lumineuse installée au sol est synchronisée avec les feux traditionnels qui règlent le trafic. Des bandes de lampes LED incrustées dans le trottoir passent au vert ou au rouge qui autorise ou non les piétons à traverser. Objectif : attirer l’attention des accros du portable qui marchent tête baissée, les yeux rivés sur leur téléphone. Il y aurait sans doute des méthodes de prévention moins coûteuses mais le conseiller municipal qui supervise l’expérience a déjà baissé les bras. « On ne peut probablement pas inverser cette tendance, dit-il, donc le mieux est d’anticiper les problèmes. »
Devinez qui va financer ces nouveaux équipements ? Le moment venu, sans doute inventera-t-on une taxe sur les téléphones mobiles, comme d’autres veulent introduire une taxe sur les boissons sucrées (et un nouveau prélèvement sur les salaires !) pour financer les soins dentaires de ceux qui en boivent trop. La solution est toute trouvée : il y a toujours quelque chose à prendre dans les poches de la classe moyenne. L’essentiel est de saucissonner la ponction en tranches suffisamment fines pour que le grand nombre les avale sans broncher. Vous comprenez : il s’agit de prévention…
Nous n’avons aucune raison de payer de nouvelles taxes, de nouveaux équipements pour un usage inadéquat d’un produit, quel qu’il soit. Le téléphone portable est un outil nécessaire dans la société connectée d’aujourd’hui. Il est éminemment utile dans la vie quotidienne. Il suffit d’en user intelligemment. Les portables sont d’ailleurs en passe de devenir eux-mêmes un outil de prévention et de diagnostic dans le domaine de la santé.
Les smartphones peuvent déjà faire office de podomètre ou mesurer le rythme cardiaque. Demain, ils pourront faire beaucoup plus grâce à des capteurs spécifiques et des applications médicales. Quelques exemples.
Il est possible de se servir de la caméra et du flash du portable pour mesurer, sur un doigt, à l’aide d’une application, le taux d’hémoglobine dans le sang et de déterminer si la personne est anémique ou manque de fer. Cette application fait actuellement l’objet d’une demande d’autorisation auprès de l’Agence américaine spécialisée.
Un capteur de mouvement peut être utilisé pour détecter l’ostéoporose, liée à une diminution de la densité osseuse. En tenant le téléphone dans une main et en tapant sur son coude, on crée des ondes détectées par le capteur. Or une diminution de la densité de l’os se traduit par un changement de la fréquence des ondes.
Au Royaume-Uni, le National Health Service teste déjà une application d’intelligence artificielle qui permettrait aux patients de connaître le degré de gravité et d’urgence de leurs problèmes de santé. Il n’est donc pas exclu que demain, quand on vous demandera qui est votre généraliste, vous répondiez: “Mon médecin s’appelle smartphone.”
Fabrice Dunand